Elmar Mock est un ingénieur horloger et en matières plastiques. Il a été avec Jacques Müller le co-inventeur de la montre Swatch, à la fin des années 1970. Il fonde en 1986 sa société d’ingénierie et de consultations technique : Creaholic, une société spécialisée dans le soutien à l’innovation. Il travaille avec de grandes entreprises multinationales telles que Bosch, Nestlé, Roche, BMW ou Tetra Pack mais aussi des PME, sur des projets d’innovation (le plus souvent des projets de création de nouveaux produits, mais aussi des projets d’amélioration d’un produit déjà existants). L’objectif de sa société est de transformer des idées en réalisations concrètes.

Ainsi, cet entrepreneur a lui-même fait preuve de créativité en fondant cette société puisqu’il a lui-même identifié un élément perturbateur et un problème auquel il fallait trouver une solution (nous verrons qu’il s’agit d’une étape déterminante). En effet, il a réalisé que si les entreprises avaient conscience de l’intérêt et de l’importance de l’innovation pour faire face aux enjeux actuels et notamment pour faire face à la concurrence, elles ne mettaient pas forcément tout en œuvre côté créativité pour y parvenir, et ne savaient pas vraiment comment s’y prendre, quelles « méthodes » adopter pour parvenir à faire naître de nouvelles idées. Une organisation a en effet besoin de stabilité pour s’établir et exercer son activité, ce qui est peu compatible avec la liberté préconisée par les créatifs.

Mock établit une métaphore pour illustrer la tension au sein d’une entreprise. Il compare  l’état créatif à l’état gazeux, dont les mots clefs sont liberté, invention, inspiration, utopie, illusion… Afin de maintenir un degré d’innovation intéressant, et que cet état puisse être exploité, il faut tout de même essayer de le structurer, le soutenir, le sécuriser. Ainsi, la structure et la clarté de l’état cristallin identifié par Mock dans sa métaphore et correspondant à l’ordre et le pouvoir des dirigeants, doit encourager les créatifs et se montrer ouverts face aux idées émergentes, sans toutefois leur laisser une marge de manœuvre infinie. C’est l’idée notamment développée dans son livre « La fabrique de l’innovation » (Dunod, 2012) : la relation établie entre la créativité et la structure pourra favoriser l’innovation. Le risque doit être pris, même si nous avons tendance à avoir une aversion au risque.

Afin de faire naître ces innovations, Mock identifie plusieurs étapes. Pour commencer, il faut identifier l’élément perturbateur afin de chercher à solutionner un problème. C’est un gage de garantie de toute idée innovante : celle-ci doit faciliter la vie, et répondre à un besoin qui n’a pas encore trouvé de réponse satisfaisante.  Il identifie ensuite :

  • La phase inventive : mise en place de réunions créatives, de discussions, d’échanges, évaluation des idées, recherches préliminaires, workshop…afin de chercher une solution. Ainsi, Google fait confiance à la créativité de ses salariés et a mis en place un système de 20% de temps libre afin de favoriser les échanges à la machine à café, dans les canapés, ou sur les bancs à l’extérieur… il a été prouvé que c’était très souvent dans ces moments que naissaient les meilleures idées.
  • La phase conceptuelle : construction du business model. Mock fait la distinction entre les innovations et les rénovations, qui sont seulement des améliorations des produits déjà existants. Ainsi pour lui, la première version de l’Iphone constituait une innovation mais les versions suivantes sont des rénovations.
  • La phase scientifique : développement électronique, mécanique…etc
  • La phase commerciale : business plan, investissement, accord de licence, distribution, logistique… Tout ce qui concerne l’opérationnel.

La vidéo porte surtout sur la première phase, à savoir la phase inventive car le problème vient des tensions présentes de façon permanente entre les différents états mentaux définis dans la métaphore. E. Mock recommande aux entreprises d’être ouvertes aux propositions des créatifs qui doivent pouvoir avoir la possibilité d’intervenir tout au long du processus, de la naissance de l’idée à la vente du produit. L’échange entre les départements d’une entreprise est la condition sinequanone de la naissance d’un produit innovant. L’ingénieur est donc pour le mélange des talents (marketeurs, ingénieurs, développeurs…) dans les groupes de travail, car cela multiplie les chances de trouver des solutions innovantes. Ainsi, dans cette vidéo, il illustre cela par la méthode 6-3-5 qui consiste à prendre 6 individus, leur demander d’écrire 3 idées puis de faire tourner ces idées durant 5 minutes : le résultat est généralement très concluant sur l’efficacité de l’échange et l’évolution des idées. D’autres types de réunions ont été inventés comme par exemple le brainstorming. En général, ces types de réunions sont d’une durée limitée (3 jours par exemple), concernent un sujet précis, avec un nombre de personnes limité, aux personnalités variées (mix and match) avec plusieurs supports matériels pour prendre des notes et stimuler l’imagination).

Je pense que l’important est de créer une dynamique de groupe ouverte, afin de favoriser les échanges et éviter l’autocensure. Les critiques constructives peuvent ensuite être entendues, une fois les idées formulées et peuvent permettre de faire des choix parmi tout ce qui a été dit afin d’obtenir un résultat optimal. Il est également possible de faire en sorte d’améliorer la motivation des collaborateurs en promouvant le développement personnel ou via une récompense (hausse de salaire par exemple) ou en utilisant des prototypes pour susciter la curiosité (diversité des supports).

La créativité est en soi, c’est une compétence dont nous sommes tous dotés dès l’enfance et 1/3 de la population est née très douée en créativité affirme Mock. Pourtant, il souligne que dans la pratique, seule 1/1000 est créatif. La créativité est pourtant en nous et attend parfois d’être sollicitée pour se révéler pleinement. Je pense que c’est en communiquant et en adoptant un mode de gouvernance  visant à permettre à ces personnes créatives de s’épanouir que ce talent se révèle. C’est ce que l’on appelle le management de la créativité, visant à encourager les membres d’une organisation ou des groupes de travail à faire preuve de créativité. La gouvernance d’une entreprise peut faire des choix comme mettre en place une formation spécifique (pour permettre un apprentissage) par exemple, car tout le monde peut améliorer ses pratiques créatives et proposer des solutions aux problèmes rencontrés par l’organisation (en interne ou en externe). Pour finir, le processus d’innovation vise finalement à créer de la stabilité dans la structure puisqu’il apporte des solutions pour l’avenir et donc rassure les collaborateurs sur la pérennité et la durabilité de leur business.